39. L’activité et les marques des éditeurs de Buda avant 1526

(Le livre dans l’Europe de la renaissance. Actes du XXVIIIe Colloque
internationale d’études humanistes de Tours. Nantes 1988. 170–181.)

Les imprimeurs et les libraires

La ville de Buda avait toujours eu une importance primordiale dans la civilisation hongroise, non seulement comme capitale, mais aussi comme important centre de production de livres. La fameuse Bibliotheca Corviniana, bibliothèque du roi Matthias, (deuxième moitié du xve siècle), a marqué de façon impressionnante le haut niveau de cette culture. Des quelque deux mille volumes de cette bibliothèque, á l’époque une des plus importantes des collections européennes, nous connaissons aujourd’hui prés de deux cents pièces, dispersées á travers différentes bibliothèques et collections du monde entier.

Mais à côté des manuscrits richement illustrés, „l’art de l’écriture artificielle”, c’est-à-dire l’imprimerie, s’est présenté également assez tôt dans la capitale hongroise médiévale. Andreas Hess avait achevé d’imprimer à Buda le 5 juin 1473 la chronique de l’histoire des Hongrois en latin. Ainsi, la Hongrie s’est placée en bon rang dans l’ordre chronologique de la propagation de la découverte de Gutenberg, précédant des pays tels que l’Angleterre, la Pologne, l’Espagne, le Portugal, etc. Pourtant l’officine de Hess est restée éphémère, nous n’en connaissons aujourd’hui qu’un seul ouvrage ultérieur. Á la même époque, une autre officine travaillait en Hongrie: de cet imprimeur anonyme, nous connaissons aujourd’hui trois ouvrages.

Plus tard, pendant un demi-siècle, l’activité d’imprimerie cessa en Hongrie, ce qui ne veut évidemment pas dire que la vie culturelle et ecclésiastique n’avait pas besoin de livres. Pour le prouver, il suffit de penser aux nouvelles possibilités que la production des livres imprimés avait fournies à la publication des ouvrages indispensables pour l’Église et les écoles. Pendant les décennies où, en Hongrie, il n’existait pas d’activité d’imprimerie, les besoins en livres était assurés par la production des ateliers étrangers. L’importation et la vente intérieure des volumes étaient faites par les livrerais, qui est très souvent s’occupaient également de la reliure. C’est dans la capitale que leur nombre et leur activité furent les plus importants.

Les livres ecclésiastiques, employés par l’Eglise avant le concile de Trente, différaient dans leurs textes suivant les diocèses. Parmi les diocèses hongrois, le plus important était toujours celui d’Esztergom, sous la direction du primat de Hongrie. La capitale, Buda, fondée seulement au début du XIIIe siècle, n’a pu être siège archiépiscopal de diocèse, ces derniers étant déjà formés au XIe siècle. Ainsi la capitale hongroise, qui compte aujourd’hui 2, 2 millions d’habitants, n’ayant toujours pas d’épiscopat indépendant, appartient encore de nos jours au diocèse d’Esztergom.

Le premier Missel et le premier Bréviaire d’Esztergom ont été imprimés en 1480, en Italie: le missel à Vérone dans l’atelier de l’imprimeur d’origine française, Pierre Maufer de Rouen, le bréviaire à Venise par Erhard Ratdolt lui, venu d’Augsbourg. Le colophon de ce „Breviarium Strigoniense” précise même le nom du libraire: „impensis vero Ioannis Cassis dicti librarii ex Ratispona”. Vraisemblablement le libraire, né à Ratisbonne, qui travailla plus tard à Vienne, se trouvait à Buda à l’époque de la publication du bréviaire. Dans l’épître dédicatoire de l’édition suivante, parue quatre ans plus tard, le libraire du volume, Theobald Feger de Kirchem, est mentionné. Le livre a été imprimé à Nuremberg par Georg Stuchs. De nouveau, quatre ans plus tard, dans l’atelier d’Erhard Ratdolt, cette fois à Augsbourg, est parue la deuxième édition de l’ouvrage de János Thuróczy, sur l’histoire des Hongrois, en latin, qui est devenu un des incunables enlumines les plus répandus. Les frais de l’édition étaient couverts cette fois aussi par Feger. Nous connaissons trois autres produits de son activité, tous à l’usage du diocèse d’Esztergom, issus de l’officine de Stahel et Preinlein à Brno, de celle de Winterburger à Vienne et de l’atelier de Stuchs à Nuremberg. Feger lui-même était non seulement éditeur, mais il vendait également les publications d’autres libraires. Cela est prouvé par sa correspondance avec Koberger, par laquelle il apparaît qu’à cause de douzaines d’exemplaires de la fameuse „Chronique” de Hartmann Schedel, envoyés à Feger, plus de quinze ans après sa parution, le libraire de Buda avait toujours une dette importante envers l’éditeur de Nuremberg.

Le nom de Georgius Ruem nous est conservé par sa marque xylographique sur le seul exemplaire en vélin de l’édition de 1493 du „Missale Strigoniense” tandis que les exemplaires sur papier sont pourvus de la marque de l’imprimeur vénitien Johann Hamann.

Parmi les éditeurs de Buda, un des plus actifs était Joannes Paep. Ses éditions ont paru entre 1497 et 1511. Les bibliographies en connaissent aujourd’hui vingt titres, tous imprimés à Venise. Cette ville était d’une part le centre le plus important de l’art d’imprimerie à l’époque, d’autre part, elle se trouve relativement prés de la Hongrie. Les imprimeurs des éditions de Paep étaient Giorgio Arrivabene, Johann Hamann, Johann Emerich, Lucantonio Giunta, Giacomo Penzio, Peter Liechtenstein et Nikolaus von Frankfurt. La copie du testament de Paep, écrit en 1509, conservée à Vienne, nous donne une image très intéressante de son activité. Il est mort avant la fin de cette même année, mais deux publications marquées de son nom ont paru deux ans plus tard à Venise, pour lesquelles il avait encore envoyé des avances considérables à Nikolaus von Frankfurt.

En ce qui concerne le libraire de Buda, Johann Hertzog, un seul volume, le „Baptis­male Strigoniense”, imprimé en 1500 dans l’officine de Winterburger à Vienne, peut lui être attribué.

Un autre éditeur, un des plus actifs avec Paep, était Urbanus Kaym, dont nous connaissons des éditions des années 1509 et 1520 – à cette date il s’agit déjà de ses héritiers. Auparavant, il avait réalisé des éditions en collaboration avec Paep.

Le nombre des éditions de Kaym est aussi de vingt, dont la majorité est imprimée à Venise par des maîtres déjà mentionnés: Johann Emerich, Peter Liechtenstein et Lucantonio Giunta. Il a fait imprimer également en territoire allemand, cette fois uniquement des manuels scolaires: à Nuremberg chez Wolfgang Huber, à Strasbourg par Jean Knoblouch père, et à Vienne par Johann Singriener. Il s’est associé avec l’éditeur viennois Lucas Alantsee pour la publication du Bréviaire du monastère bénédictin de Pannonhalma; le volume fut imprimé dans l’officine vénitienne de Peter Liechtenstein très expert dans ce genre d’ouvrages.

L’édition de 1510 de l' "Ordinarius Strigoniense” a été commandée par Kaym dans une officine, jusqu’ici non identifiée par ses caractères typographiques, de la ville de Lyon, assez lointaine pour nous autres Hongrois.

Une autre preuve de ces contacts étrangers bien développés est le Bréviaire du diocèse de Cracovie en Pologne, imprimé dans l’atelier vénitien de Giunta. L’unique exemplaire de cet ouvrage a été récemment découvert dans la bibliothèque universitaire de Cracovie. C’est le seul volume qu’un éditeur de Buda ait publié pour une destination étrangère.

Les dépenses du volume imprimé en 1510 à Lyon ont été partagées entre Kaym et Matthias Milcher. Ce dernier a fait imprimer l’année suivante à Venise chez Giacomo Penzio, la biographie de saint Paul l’Ermite, le saint dont le seul ordre fondé en Hongrie, l’ordre des Ermites de Saint Paul, a reçu le nom. Le couvent le plus connu de l’ordre est aujourd’hui le centre de pèlerinage national des Polonais, Czêstochowa. Milcher, lui, travailla plus tard à Vienne, où il fit publier quatre autres ouvrages, destinés à la Hongrie.

Le nom de Stephanus de Wardia nous est conservé par József Kemény, qui a vécu il y a un siècle et demi. Il a donné la description très détaillée d’un ouvrage, inconnu de la littérature moderne (Renouard-Moreau), imprimé à Paris, dont l’auteur, un certain Arnoldus de Bryennio est également inconnu pour le moment. Le volume, ainsi devenu assez douteux, aurait été imprimé en 1511 „Parisiis in edibus Ascensionis et Joanis Peticij” (sic) „sous le titre Sermones de tempore”. Il s’agirait donc des deux plus grands imprimeurs et éditeurs parisiens de l’époque, qui auraient travaillé „impensis Stephani de Wardia librarij Budensis in Ongria”. À notre doute s’ajoute encore le fait que, après la description de Kemény, la marque d’éditeur ferait voir la Vierge avec les lettres „W” et „I” de part et d’autre. Cela est assez étrange car d’une part, contrairement à ce qui serait normal, l’ordre des noms est hongrois: nom de famille suivi du prénom, d’autre part, l’initiale du prénom est celle de la variante hongroise du nom latin „Stephanus” à en hongrois „István” alors qu’à l’époque, les prénoms étaient employés généralement, sous leurs formes latines. En raison de toutes ces incertitudes, il y a tout lieu de penser que le comte Kemény, historien amateur, avait décrit, non pas un volume conservé dans sa bibliothèque, détruite dix ans avant cette communication, mais plutôt un volume qui avait existé dans son imagination.

Dans l’ordre chronologique, le libraire suivant est Stephanus Heckel. Il est connu par quatre volumes, tous imprimés dans l’atelier vénitien de Liechtenstein entre 1512 et 1514. Deux sont des éditions en collaboration avec Kaym.

C’est vraisemblablement lui qui est mentionné dans le testament de Paep sous la désignation de compagnon István, et ainsi fut-il le successeur de Paep. De même il a existé des contacts entre Paep et Jacobus Schaller, car c’est avec son nom, que l’ancienne marque de Paep se présente dans les imprimés vénitiens. Nous avons de lui sept volumes imprimés entre 1512 et 1516 à Venise par Pietro Quarenghi, Lucantionio Giunta, Nicolaus von Frankfurt, Melchiore Sessa père et Pietro dei Ravani.

Le comte Kemény, dont nous avons parlé plus haut, donne la description également précise d’un éditeur de Buda, tout aussi inconnu, Antonius Murarius. En outre, l’auteur de l’ouvrage qu’il cite de cet éditeur est inconnu, au moins sous cette forme: „Matthie Paulini Pludentini Rheti De scientias discendi arte”. Selon Kemény, le livre est imprimé dans l’officine de F. Peypus à Nuremberg en 1513, daté précisément avec la mention: „impensis Antonii Murarii bibliopola Budensis”. Les initiales de la marque de l’éditeur se succéderaient ici également à la façon hongroise, donc dans l’ordre inverse.

Une troisième publication, après la communication de Kemény, l’ „Index geographicus” de Georgius Sabinus aurait été imprimée en juin 1523 par l’imprimeur de Turin, Antonio Ranoto, cette fois „impensis Leonardi de Sessardia bibliop. Budensis”. Dans ce dernier cas, seul le nom de l’imprimeur est connu chez Bersano-Begey: toutes les autres données sont incertaines. Ainsi donc, le nom et l’activité de cet éditeur restent également douteux. Par contre, nous avons des preuves incontestables du travail de Michael Prischwitz, qui, entre 1523 et 1525, a fait imprimer trois livres liturgiques pour le diocèse d’Esztergom, par Peter Liechtenstein à Venise.

Il est le dernier parmi les éditeurs de Buda de cette époque: la liste contient donc six noms certains et trois personnages dont l’existence peut être mise en doute. La bibliographie des volumes parus avec la contribution de ces éditeurs comprend soixante-dix titres dont deux tiers sont les livres liturgiques destinés aux diocèses hongrois. Comme nous l’avons dé’jà vu, le diocèse d’Esztergom avait un rôle primordial, mais à Buda, d’autres volumes ont paru pour d’autres évêchés, comme celui de Pécs dans le sud, celui de Zagreb, aujourd’hui en Croatie ou celui d’Eger, dans le nord du pays. En ce qui concerne les ordres religieux, outre celui des Ermites de Saint-Paul, les éditeurs de Buda ont fait imprimer des livres liturgiques pour le monastère bénédictin de Pannonhalma.

La majorité de ces volumes sont des Missels, qui sont suivis par des Bréviaires et des livres de cérémonies, les Obsequales et Baptsmales et les Psautiers. On peut encore y ranger l’ouvrage intitulé „Propriorum sanctorum regni Hungariae”, anthologie pour l’office des saints hongrois, aussi bien que la „Legenda sanctorum regni Hungariae” qui avait la même destination, mais dont le texte n’est pas défini par la liturgie. La collection des décisions du concile d’Esztergom appartient à ces publications.

Un autre groupe de livres édités à Buda, bien moins nombreux que le précédent, est celui des manuels scolaires. Ils ont paru dans les années 1507–1519, l’âge d’or de l’activité des éditeurs de Buda. Ces volumes comprennent les manuels élémentaires de langue latine (Donatus, Alexander de Villa Dei, etc.) et les bases de la philosophie d’Aristote. Ne peuvent être rangés dans les catégories ci-dessus quelques livres qui sont en rapport avec l’histoire hongroise ou avec celle de l’ordre des Ermites de saint Paul. Il est utile de noter qu’il existe plusieurs douzaines d’autres publications liturgiques, de la même époque, mais sans que Buda fut mentionné comme lieu d’édition.

Les marques typographiques


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La plupart des publications des éditeurs de Buda, conformément à l’usage de l’époque, portent des marques typographiques et des marques d’éditeur. Le volume de Cassis n’en a pas encore, mais Feger posséde déjà deux marques: l’une était employée chez Ratdolt (Fig. l) l’autre dans l’officine de Stahel et Preinlein à Brno (Fig. 2). Elles sont presque identiques: une croix à laquelle s’ajoutent en bas deux lettres renversées „C” et „E”. Cette énigme est restée indéchiffrable jusqu’à nos jours. Le bois d’Augsbourg contient en outre les initiales de Feger. La marque de Ruem (Fig. 3) donne le nom en entier et au milieu, les lettres „I” et „R” entrelacées. Alors que le „R” renvoie sans doute à son nom de famille, le rapport entre le „I” et le prénom Georgius est beaucoup moins évident. Par contre, il n’y a aucun problème d’initiale sur le bois de Hertzog (Fig. 4) où figurent les lettres „I” et „H” avec une croix. Cette marque, comme les deux précédentes, est imprimée en rouge. L’un des plus importants parmi les éditeurs, Paep, possédait huit marques. Toutes portent ses initiales, avec une croix sur la ligne qui relie les lettres. La première, encore du xve siècle, est composée d’un cercle entouré de guirlandes, surmonté d’une croix double (Fig. 5). À l’intérieur du cercle, on voit les initiales de Paep. À part les lettres, le bois est identique à la marque vénitienne de Nikolaus von Frankfurt (Fig. 6). La gravure suivante de Paep est déjà une variante beaucoup plus élaborée. En haut, on voit les portraits des Pères de l’Église, Gregorius et Hieronymus, en bas, deux anges couronnant la croix double d’une couronne royale (Fig. 7). Le motif dominant de la première marque de Paep appartenant au XVIe siècle, est cette même croix avec les initiales (Fig. 8); en bas, on voit une bande dans laquelle le texte est écrit avec des abréviations „Joannes Paep librarius Budensis”. C’est cette marque qui se répète sur les volumes imprimés par Johann Emerich à Venise, qui ne portent pas le nom du typographe, tandis que dans la publication issue des presses de Giacomo Penzio, on en a une copie plus ou moins fidèle (Fig. 9). Les deux variantes peuvent être différenciées par la bande de texte: sur la première, la bande commence en haut et se termine en bas, sur la deuxième, c’est l’inverse. Les quatre marques suivantes de Paep, qu’il a employées dans la seconde période de son activité, ont des ornements avec figures. Dans ces genres de bois, on a imprimé avec des caractères typographiques le nom de l’éditeur, à l’intérieur ou à coté des motifs. Le premier de ces bois est visible sur la page de titre du volume imprimé par Giunta et Penzio à Venise (Fig. 10): il représente le patron de Paep, saint Jean, plongé dans de l’huile bouillante. Le bois représentant saint Benoît avec un livre à la main signale que le bréviaire est destiné aux Bénédictins de Pannonhalma (Fig. 11). Les deux, dernières marques de Paep, avec la représentation du patron du diocèse d Esztergom, l’évêque martyr de Prague, saint Adalbert, figurent sur plusieurs volumes destinés à l’archevêché. La première variante est une représentation plus simple (Fig. 12), l’autre est entourée d’un cadre orné (Fig. 13).


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De l’autre important éditeur de Buda, Kaym, il nous reste six marques. Tous ces bois contiennent le groupe de lettres formé par ses initiales, des lettres „V” et „K” entrelacées, la dernière est allongée vers le haut et se transforme en une croix. Comme Paep, Kaym, lui aussi, avait employé à Venise uniquement les bois avec ces initiales. Sur ses volumes imprimés en territoire allemand, il n’avait pas de marque. Un de ses bois est gravé dans un style tout à fait identique à celui des bois de Paep, avec la seule différence que la bande de texte chez Kaym commence en bas et s’y termine aussi (Fig. 14). Alors que les bois précédents avaient des lettrines blanches sur fond noir, sur la marque suivante de Kaym, c’est le contraire: initiales noires sur fond blanc (Fig. 15).


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Dans la deuxième décennie du XVIe siècle, Kaym aussi changea sa marque pour y ajouter une figure. Il choisit pour patronne la Vierge, qui était considérée comme patronne de la Hongrie depuis le XIe siècle. Le bois représente d’abord seulement la Vierge et l’Enfant (Fig. 16), plus tard, la Vierge sur un trône fleuri, entourée de fidèles, sous la conduite du pape et de l’empereur (Fig. 17). Sur la marque suivante, les initiales entourées d’un petit cercle, se trouvent dans un cadre rectangulaire, où l’on peut lire le nom de l’éditeur; le texte est lui-même gravé sur bois (Fig. 18). La largeur de ce dernier cadre est identique à celle du bois situé au-dessus, représentant une scène d’école, tant de fois repris dans les manuels scolaires. Evidemment, cette gravure était employée aussi dans d’autres imprimés de Venise, indépendamment des marques de Kaym. Les héritiers de Kaym reprennent les initiales avec le cadre rectangulaire (Fig. 19). Ce sont également les initiales surmontées d’une croix qui forment la marque de Milcher. Puisque ses deux noms ont la même initiale, sa première marque est composée d’un seul „M” (Fig. 20). Plus tard, entourée d’un cercle, elle est complétée par l’image de la Vierge debout sur le croissant (Fig. 21). Cette marque est employee dans l’atelier viennois de Winterburger qui suivait le style vénitien.


Fig. 21

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Fig. 23

Fig. 24

La marque de Heckel est intéressante, sans être pourtant unique. La lettre „S” qui représente son prénom, est fixée sur le manche d’une hachette puisque c’est la signification exacte de son nom de famille allemand. Sur ses trois marques, nous avons toujours en bas ce motif parlant. Le premier bois représente le patron de l’éditeur, le premier roi des Hongrois, saint Etienne (Fig. 22); sur un autre, la même représentation avec une autre gravure (Fig. 23). La scène dessinée pour le Missel de l’ordre des Ermites de saint Paul, montre le fondateur et le patron de l’ordre avec trois moines agenouillés, leur offrant un livre (Fig. 24).

Les premières marques de Schaller ont été dessinées en transformant celles de Paep. Bien que son patron n’ait pas été saint Jean, il a quand même fait simplement regarder la marque de Paep, avec ses propres initiales (Fig. 25). L’initiale des deux prénoms Joannes et Jacobus étant la même, il lui a suffi de changer une seule lettre. Pour le Missel d’Esztergom, il a employé la première marque de Paep, représentant saint Adalbert. Cette gravure nous est restée à l’état de fragment (Fig. 26). Le changement du nom complet ne posait pas de problèmes puisque le texte était imprimé en caractères typographiques. Il est même possible que la troisième marque de Schaller provienne de Paep, bien qu’elle soit inconnue jusqu’ici dans les publications de Paep. La gravure représente saint Jean l’Evangéliste écrivant le texte sacré (Fig. 27).


Fig. 25

Fig. 26

Fig. 27

Fig. 29

Fig. 2
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Le dernier des éditeurs de Buda, dans l’ordre chronologique, est Prischwitz. Lui aussi a formé sa marque à partir des initiales de son nom: ausommet de la ligne centrale, c’est plutôt une étoile qu’une croix qui est visible. Au-dessus, on voit une image de la Vierge (Fig. 28). Dans un autre volume nous avons une gravure de la Vierge différente, qui n’est autre que la gravure déjà vue sur les marques de Kaym (Fig. 29). Au total, nous avons vingt-huit marques gravées sur bois de neuf éditeurs de Buda.

L’activité des éditeurs de Buda fut interrompue par la grande défaite militaire infligée par les armées turques en 1526, à Mohács, dans le Sud de la Hongrie. Les premiers courriers, dés le lendemain soir, arrivent à Buda avec la nouvelle de la mort du roi et de l’anéantissement de l’armée hongroise. La reine Marie de Hongrie, veuve du jeune roi, soeur cadette de l’empereur Charles Quint, s’est enfuie la première à Vienne. Plus tard, elle sera nommée par son frère gouvernante des Pays-Bas. Les différentes couches de la société féodale ont quitte la ville dans un ordre presque hiérarchique: d’abord l’aristocratie, puis la noblesse et enfin, tous les bourgeois. Le sultan, Soliman II, entre dix jours plus tard dans la capitale hongroise, jadis florissante, n’y a trouvé que des juifs, exclus de la société médiévale et des mendiants. Le début de cent cinquante ans d’occupation turque de la Hongrie marquait l’interruption, pour longtemps, de toute activité éditoriale.


A Mohács elõtti budai kiadók tevékenysége és jelvényeik

A magyar fõvárosban a Mohácsot megelõzõ évtizedekben élénk könyvkiadói tevékenységet folytatott legalább tíz könyvkereskedõ. Termékeik közül ma több mint hatvan ismeretes. Miután ekkoriban Magyarországon nem mûködött egyetlen nyomda sem, e könyveket külföldön (elsõsorban Velencében) készítették. Ezek többségükben a hazai egyházmegyék részére szolgáló szertartáskönyvek, de akadnak köztük tankönyvek is. Jelentõs részük a budai kiadók fametszetes jelvényét viselik. A cikkben 29 ilyen reprodukciója látható.




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